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Reillanne
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Reillanne
REILLANNE ET SON HISTOIRE
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Charmant village perché de Haute Provence, à l’est du Parc du Luberon,
Reillanne est situé sur l’ancien itinéraire romain reliant l’Italie à
l’Espagne, entre les villages de Céreste à l’Ouest et Forcalquier à
l’Est. Il domine au Sud la vallée de l’Encrême, dont l’ancienne via
dimicia (actuellement RD 1100) suit le tracé, avec en toile de fond la
chaîne du Luberon, et est bordé au Nord par les contreforts de la
Montagne de Lure et à l’Est par la vallée du Largue (également
affluent de la Durance). |
C’est un village vivant et accueillant de plus de 1600 habitants où l’art
et la culture fleurissent.
En arrivant au village, dominant sa butte castrale qui culmine à 585 m
d’altitude, on découvre immédiament l’église St Denis avec son clocher
carré et ses horloges, ainsi que des vestiges de constructions castrales
adossés à une Tour ronde, la Tour St Pierre.
La cloche de l’église St Denis « la Denyse » ponctue heure par heure la
vie des reillannais.
Mais ce paysage est, comme vous allez le lire, bien différent de ce que
pouvait être le castrum de Reillanne au moyen-age.
Site privilégié et voie de communication importante, le peuplement du
territoire de Reillanne est très ancien (on y a retrouvé des abris sous
roche du mésolithique). La conquête romaine apporta l’installation de
villas
(Pinet et Mas des Prés), vastes domaines agricoles qui concentraient une
population importante autour de
la via domitia
celle-ci facilitant les échanges.
Au début de l’ère chrétienne des églises et
abbayes
se développent sur ces sites très peuplés (St Mitre à Pinet et
St Suffrein au Mas des Prés, et Carluc vers Céreste). Puis,
vers le 7è siècle les invasions sarrasines poussent les habitants de la
plaine et des villas à se réfugier sur les buttes et à se protéger. Ils
s’implantent sur la butte St Denis de Reillanne et sur d’autres éminences
alentours comme Mane, Dauphin, Villemus ou Montjustin.
Autour du 10è siècle, le système féodal se met peu à peu en place et les
seigneurs locaux , l’ancienne famille mérovingienne des Foucher , dont est
issu St Mayeul abbé de Cluny, prennent le nom de famille de Reillanne
qui possède un territoire immense.
En effet le territoire
de Reillanne autour du 11è siècle est très étendu et prospère. Les textes
parlent de la «
Vallée de Reilanne » qui englobe aussi
les villages voisins (Villemus, Montjustin, Chateauneuf, Céreste, Aubenas,
Lincel, le Bourguet et probablement St Michel, St Maime,Dauphin, St
Etienne les Orgues, Ongles et Fontienne et peut-être Mane pour un temps.
Le fief de Reillanne fait alors partie de la viguerie de Forcalquier et
du diocèse d’Aix et la paroisse dépend de l’abbaye de
Montmajour d’Arles. Le bourg bénéficie du privilège de municipe
hérité de l’organisation romaine. La foire de la St Denis en
Octobre était très réputée et attirait un grand nombre de visiteurs.
Le site castral des
seigneurs de Reillanne, juché sur la butte, était magnifiquement situé.
Dès le 11è s les textes du moyen age parlent déjà du castrum de
Reillanne et du Turnus entouré de murailles (fortalicium)
et d’un fossé , preuves de l’existence d’un château.
Cependant dès cette époque le territoire commence à être démembré
par la famille de Reillanne qui s’est beaucoup agrandie et a donné des
apanages aux héritiers et des dots aux filles. Dès lors on assiste au fil
des ans au détachement de villages et châteaux alentours, la branche ainée
des Reillanne restant sur le village.
Dès la seconde moitié du 12è siècle, des textes indiquent déjà 9
co-seigneurs de Reillanne et il y en aura jusqu’à 12 au 14è siècle .
Au moyen âge le turnus était donc très peuplé.
En 1379 – les villages
de l’ancienne vallée de Reillanne sont donnés à Fouquet d’Agoult par la
Reine Jeanne, reine de Provence qui érige la seigneurie en vicomté.
Celui-ci s’engage à respecter les franchises des communautés villageoises.
mais après sa mort la vicomté continue à être morcelée et revendue
passant entre les mains de plusieurs familles, les Brémond, les Bouliers,
les Marin ,jusqu’aux Thomassins, derniers vicomtes de Reillanne.
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La
face nord de la butte St Denis étant très escarpée le bourg médiéval,
le Burgus s’est construit au sud et à l’est de la butte
castrale - Il était lui aussi entouré de remparts et de fossés comme
l’indiquent les textes du 14è « barrium novum » (murs neufs)
Il y avait donc 2 enceintes, une autour du Turnus et l’autre
autour du Burgus, construite ultérieurement, et elles étaient toutes
deux entourées de fossés. On imagine facilement les contours sur cette
photo aérienne du village actuel et sur le cadastre de 1833. |
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De
ces fortifications détruites au fil du temps il reste malheureusement
bien peu de vestiges hormis quelques pans de murs épars ayant souvent
servi de substructions à des constructions tardives ainsi que deux
portes sur le rempart du bourg qui donnent encore accès au vieux
village .
La porte Notre Dame . C’est un passage voûté en berceau avec
au milieu 2 arcs de pierre séparés par une rainure pouvant
recevoir la herse et qui retombent sur un quart de rond- Elle
daterait du 13è siècle.
De là, part la rue principale du village médiéval, carreria
publica, aujourd’hui rue grande qui monte vers
la butte St Denis. Dans cette rue se concentraient les artisans et
commerçants du moyen-âge. |
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Le
Passage des abattoirs – Ouvrant sur le burgus par l’Est, il
pourrait être la Porte de la fontaine citée au 14è
siècle car il donne accès à la Place de la Pause, hors des remparts,
qui permettait de se reposer quand on remontait du lavoir et de la
fontaine en contrebas, seul point d’eau du village au moyen-âge. |
On accède au sommet de la butte Saint Denis par la Porte St Pierre.
Appelée aussi Porte des Forges c’est un bel édifice à la
construction très soignée qui peut dater du 12e-13e siècles et
est inscrite à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques.
Il reste seulement le rez-de-chaussée voûté en berceau brisé sur
arcs doubleaux qui s’appuie sur le côté nord contre un mur double
en moellons, d’orientation est-ouest, dont il ne subsiste que des
vestiges et qui pourrait être un reste de remparts.
Mais le mode de construction et l’implantation de la porte St Pierre
suscite beaucoup d’interrogations parmi les archéologues pour savoir
quelle était sa fonction réelle. Selon F. Guyonnet elle pourrait être
la base d’une tour faisant office de clocher porche qui serait
accolée au Nord à la courtine elle-même collée au mur gouttereau d’une
église antérieure, l’église St Pierre dont les textes du Moyen
Age parlent et dont les chercheurs n’ont pas encore pu trouver
l’emplacement exact sur le Turnus.
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Au
sommet du site castral, le Turnus a lui aussi été peu épargné
par les outrages du temps. L’historien Achard au 19è décrit le château
de Reillanne comme « magnifique, avec 4 tours et une enceinte de
murailles flanquées de 17 ou 18 tours de formes différentes »
Les textes du moyen âge corroborent cette description puisqu’au moins
2 Tours érigées dans le Turnus sont décrites comme ayant appartenu aux
Bermondi et à Fouques d’Agoult, vicomte de Reillanne . Il est dit
aussi que le vicomte de Bouliers seigneur de Reillanne possédait au
14è siècle une maison fortifiée dans le Turnus. |
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Au fil du temps les guerres de religion puis la révolution, et enfin
plus près de nous, la construction dans les années 1950 d’un réservoir
d’eau sur le site de St Denis pour alimenter la ville en eau, tous ces
évènements ont participé à la dégradation du site castral dont il ne reste
aujourd ‘hui qu’une église la chapelle St Denis, construite au
19ème mais dont le clocher a été bâti sur le reste d’une tour carrée
médiévale, ainsi qu’une tour en fer à cheval du 16ème siècle
sur laquelle s’adossent des vestiges de l’ancienne chapelle castrale St
Denis.
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En effet la lecture des
comptes-rendus des conseils
municipaux de Reillanne entre 1830 et 1870 nous apprennent que
l’ancienne chapelle castrale St Denis, orientée Est Ouest, encore
visible sur le cadastre de 1833, s’étant écroulée quelques années
auparavant, la nouvelle église St Denis fut reconstruite en
1858 par les Pénitents Blancs en remployant ses pierres. Sur les
murs de l’église du 19è orientée Nord Sud on retrouve des pierres de
taille portant des marques de tacherons identiques à celles présentes
sur le mur vestige de l’ancienne église romane. Elle fut adossée à
une tour carrée médiévale isolée, encore érigée à cette époque,
qui fut rehaussée dans les années 1870 pour en faire un clocher.
Sur la face nord du clocher on voit la trace d’une porte médiévale
couverte d’un arc en plein cintre qui a été obstruée et dont l’accès
devait se faire par l’extérieur au moyen d’un escalier disparu. Cette
tour est de plan carré de 6,70 m de côté avec des murs d’1,60 m
d’épaisseur, bâtie en gros moellons. |
A l’est de la chapelle St Denis actuelle se trouvent
les restes de l’ancienne église St Denis adossés à une grande
tour semi-circulaire surmontée d’un clocher mur. De l’église ancienne
St Denis, chapelle castrale des seigneurs de Reillane, ne subsiste
qu’un chevet plat en pierre de taille de bel appareil couverte
d’une voûte en plein cintre reposant sur des arcs doubleaux.
Deux niches sont visibles sur ce chevet et on peut dater les quelques
vestiges de la seconde moitié du 12 e ou du début du 13e siècle. Sur
le pignon de la chapelle romane on a construit ultérieurement une tour
ronde qui ne serait pas une tour de flanquement contre une courtine
mais un clocher-mur placé dans l’ axe du chevet pour signaler
la présence de cette chapelle castrale : c’est la Tour St Pierre
(appelée Tour de l’Horloge jusqu’en 1870, car jusqu’à la construction
du clocher de la nouvelle église St Denis, c’est elle qui portait
l’horloge) La construction est en moellons irréguliers et seules les
petites ouvertures et le clocher à 3 baies en plein cintre pour les
cloches sont en pierres de taille. Cette tour peut être datée vers
la fin du 15 ème ou du 16 ème siècle. |
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Lors de la rénovation de l’église St Denis en 2000, il
a paru souhaitable d’effectuer des fouilles pour mieux comprendre la
topographie des lieux. L’archéologue Dominique Peyric entreprit
un premier diagnostic et étudia un petit périmètre de fouilles aux
abords de l’ancienne chapelle St Denis. Elle mit au jour une partie du
mur de l’ancienne chapelle castrale et le blocage probable du sol de
son chevet. La chapelle était couverte d’une voûte en plein cintre
retombant sur des arc doubleaux. A l’avant du chevet , sous l’arc
doubleau, un mur de renfort en moellon a été construit vers le 15è ou
16è (peut-être pour le conforter lors de la construction de la tour
clocher ?). Elle a aussi dégagé le départ d’une construction
massive au sud de la plateforme avec des murs très larges. |
En 2001 l’archéologue François Guyonnet poursuivait son travail
et étudiait 200 m2 devant la façade de l’église St Denis. Le site étudié
en surface a permis de dégager partiellement un grand nombre de structures
de toutes époques allant du 13è au 19 è siècle.
Deux bâtiments du moyen-âge ont été identifiés au sud de l’église dont
l’un est probablement celui découvert précédemment qui pourrait être
une maison forte construite en L et avec des murs très épais. La
construction est un peu semblable à celle de la tour médiévale du clocher
érigé et on peut situer sa construction aux alentours du 13 ème mais le
bâtiment est plus vaste.
Un second bâtiment médiéval est également visible à l’ouest mais plus
difficile à identifier ainsi qu’une cave du 14 ou 15è siècle avec à
l’intérieur des tessons.
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Ces fouilles ont donc permis de corroborer les données historiques
recueillies et confirment que la plate forme de saint Denis devait
être couverte de multiples constructions Tours ou maison forte.
Le terme castrum pourrait désigner cette concentration d’habitat noble
au sommet du site et possédant leur propre chapelle placée sous le
patronage de St Denis. Le morcellement de la seigneurie de Reillanne
et la présence de nombreux co-seigneurs expliquerait cette
topographie.Par contre l’emplacement exact dans le Turnus de
l’église St Pierre et du cimetière St Pierre, (église paroissiale au
moyen âge et siège de nombreux contrats) ne sont toujours pas
déterminés ainsi que le marché du moyen âge (Mercatus) à la frontière
entre Turnus et Burgus. Il serait donc intéressant de poursuivre les
fouilles sur l’esplanade St Denis et aux abords de la Porte St Pierre
pour nous permettre de mieux connaître le Reillanne du Moyen Age.
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A partir du 16è siècle le Turnus très dégradé est abandonné et la
population quitta le sommet de St Denis pour s’installer vers le bas
de la butte. Le bourg s’agrandit dans et hors des remparts. Une petite
chapelle romane hors les murs fut agrandie pour devenir l’église
paroissiale Notre Dame avec son beau portail florentin. La création de
la fontaine en 1874 et du mur de soutènement du cours Thierry
d’Argenlieu, finit de rendre à la place son aspect actuel. C’est
aujourd’hui l’emplacement du marché du dimanche et le cœur du village. |
Angélique Pasternak
Sources bibliographiques :
- Emile Lauga « Reillanne à travers les âges »
- Danuta Poppe « Economie et société d’un bourg provençal au 14è siècle
Reillanne en Haute Provence
- Rapports de fouilles D.Peyric et F.Guyonnet 2000 et 2001
Merci pour leur aide à : Dominique Peyric, archéologue,
et à Jean-Pierre Spalla et Raymond Sube de l’Association « Patrimoine de
Reillanne »
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